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Poutres de pin blanc de Chicago

1871 Bar debout dans le Bistro, bancs dans l'Atrium et dans le Salon au niveau 2

Lors du grand feu de Chicago, des chantiers forestiers florissaient dans la région qui deviendrait Sudbury et ce bois a aidé à rebâtir la ville dévastée. Aujourd’hui, du pin blanc récupéré de bâtiments démolis de Chicago orne notre Place des Arts.


Poutres de Chicago

1871

Toute une aventure qu’ont vécue ces poutres de pins blancs rapatriées récemment de Chicago  à Sudbury, leur lieu d’origine. Après avoir servi à la construction d’un ou de plusieurs immeubles dans la ville de Chicago suite à l’immense incendie qui a ravagé son secteur nord-ouest, en 1871, elles auront une nouvelle vie dans la Place des Arts du Grand Sudbury. On pourra les retrouver – et leur souhaiter un bon retour à la maison – dans le Bistro, soit assis sur un banc ou en examinant certaines parties du mur.

Ces poutres ont débuté leur vie, il y a sans doute des centaines d’années, au sein des immenses forêts vierges de pins blancs répandues dans les nombreux cantons au nord de ce qui est aujourd’hui la Ville du Grand Sudbury. Elles ont donné leur nom à la mission des pères Jésuites, soit Sainte-Anne-des-Pins.

Ces forêts ont vite fait la convoitise des entrepreneurs forestiers – surtout américains – qui les ont vues non comme des êtres vivants – à la façon des Ojibwés qui habitaient la région depuis près de 9 000 ans – mais comme de simples marchandises inanimées, vouées à l’échange et la création de plus-value. Ces entrepreneurs les ont découvertes lors de l’arpentage de ces cantons du district de Sudbury, commandé par le gouvernement du Haut-Canada, au cours des années 1840.

Huronia
Imaginons un campement Ojibwa sur les bords du ruisseau Junction au XVIIIe siècle en respect intégral de l’environnement naturel

La convoitise de ces richesses naturelles par les Blancs est en partie responsable de la signature du traité Robinson-Huron, en 1850, lequel repoussa les Ojibwés dans des territoires limitées – des réserves – afin d’ouvrir le reste du territoire à l’exploitation. Seuls témoins, en compagnie des lacs, des rivières et des ruisseaux, de la vie quotidienne des Autochtones, ces peuplements forestiers de pins blancs ont tôt fait de succomber aux haches et aux scies des bûcherons. Traînés ensuite jusqu’aux cours d’eau, dont le plus important était la rivière Wahnapitei, ces pins ont été transportés aux divers moulins établis le long des rives de la Baie Georgienne et du lac Huron.

Les effets de la coupe des peuplements de pins blancs dans les cantons au nord de la Ville du Grand Sudbury, circa 1880

L’entreprise forestière américaine la plus importante de cette époque, la compagnie Emery Lumber, possédait un immense moulin à Bay City, au Michigan, sur les bords de la rivière Saginaw qui déversait ses eaux dans la baie du même nom au sud du lac Huron. Cette entreprise transportait tellement de produits forestiers qu’elle a fait construire, en 1886, un immense bateau, long de 275 pieds, large de 51 pieds et profond de 12 pieds, capable de contenir 275 000 pieds de rondins et 2 500 000 pieds de bois de charpente. Ce navire, la Emery Lumber l’a baptisé Wahnapetae, du nom de la rivière qui livrait ses produits forestiers des cantons du district de Sudbury jusqu’à la Baie Georgienne. Le Wahnapetae les cueillait à l’embouchure de la rivière pour les livrer à son moulin de Bay City.

Plusieurs de ces rondins transformés en bois de charpente de longueurs et de grosseurs variables ont pris le chemin de Chicago pour contribuer à la reconstruction de cette ville ravagée par un immense incendie

Le grand incendie de Chicago

Le soir du 8 octobre 1871, dans le creux d’une sécheresse qui durait depuis le mois de juillet, empirée par de grands vents qui soufflaient constamment du sud-ouest, un incendie se déclara dans un secteur près du centre-ville de Chicago. Il dura pendant près de trois jours, soit jusqu’au 10 octobre réclamant la vie de 300 personnes, détruisant 9 kilomètres carrés de la ville et laissant environ 100 000 résidants sans abri.

Map

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Carte de la ville de Chicago qui illustre, en rouge, le secteur de l’incendie de 1871.

L’origine exacte de cette conflagration n’est toujours pas connue avec certitude. On croit que le feu a débuté vers 20h30 dans ou près d’un étable propriété de la famille O’Leary. Compte tenu du fait que la très grande majorité des immeubles était de bois, l’incendie se propagea très rapidement. L’hypothèse la plus populaire (mais non vérifiée) – parmi plusieurs – veut que le feu ait débuté dans l’étable où Mme O’Leary s’affairait à trayer sa vache. Cette dernière aurait frappé une lanterne avec l’une de ses pattes déclenchant ainsi ce feu historique.

Inondée de dons venant de plusieurs coins des États-Unis et d’autres pays, la ville de Chicago (ou plutôt les hommes d’affaires et les résidents) ne tarda pas à commencer la reconstruction. En 1893, soit vingt-deux ans après le désastre, Chicago a pu accueillir plus de 20 millions de touristes venus participer à sa World’s Columbian Exposition.

La reconstruction des secteurs affectés permit à un groupe d’architectes, connu sous le nom de Chicago School, de se faire une renommée internationale. Cette reconstruction a mené à quelques innovations architecturales, dont l’utilisation de poutres d’acier qui ont permis l’érection de gratte-ciel. L’hôtel King Edward, sur le site duquel la Place des Arts est érigé, a été l’un des premiers édifices de Sudbury à intégrer des poutres d’acier dans son architecture. 

Les poutres de pins blancs qui entament une nouvelle vie dans Le Bistro de la Place des Arts ont grandement contribué à cette reconstruction de Chicago, il y a plus de 100 ans.  


Donald Dennie

Natif de la région de Sudbury (Blezard Valley), Donald y a fait ses études aux niveaux primaire, secondaire (Collège du Sacré-Cœur), et postsecondaire (Université de Sudbury et Université Laurentienne). Après avoir obtenu son BA de l’Université Laurentienne, il a été journaliste d’abord au journal hebdomadaire L’Information pendant un an et ensuite au quotidien Le Droit à Ottawa pendant neuf ans. Il a obtenu sa maîtrise en Sociologie de la Carleton University en 1969 et a obtenu un poste d’enseignement à la Laurentienne en 1974. Par la suite, il a obtenu une maîtrise en Histoire de l’Université Laurentienne en 1985 et un Ph.D. en Histoire sociale de la Carleton University en 1989. Au cours de ses 36 années à la Laurentienne, Donald a été membre du département de Sociologie et a occupé plusieurs postes administratifs au sein de l’université. Il a eu le plaisir d’être l’un des six co-fondateurs de l’Institut franco-ontarien et le premier directeur de la Revue du Nouvel-Ontario. Au cours de sa carrière universitaire, il s’est intéressé tout particulièrement à l’histoire de la ville et de la région de Sudbury en publiant trois livres : La paroisse Sainte-Anne-des-Pins de Sudbury (1883-1940). Étude de démographie historique, Société historique du Nouvel-Ontario, Documents historiques no 84, 1986; À l’ombre de l’INCO. Ottawa, Les Presses de l’Université d’Ottawa, 1981 et Une histoire sociale du Grand Sudbury. Le bois, le roc et le rail, Sudbury, Les Éditions Prise de parole, 2017.